page précédente

DE LA HARDROUYERE

Notre ami de la Hardrouyère est né à Caroles (Manche) le 4 septembre 1888.
Interne au Lycée de Brest de 10 à 15 ans, il quitte l’école pour embarquer comme mousse et novice sur dundees et goélettes. A 18 ans, il entre au cours de Brest, dont le professeur était le père Jaffrin, qui a formé tant de générations de capitaines, au demeurant, un excellent pédagogue. Reçu élève de la Marine Marchande, notre camarade devance l'appel et à 19 ans, part au service, qu’il effectue sur le BRENNUS, à Toulon, bateau école des élèves de la Marine Marchande qui y font leur année réglementaire.
A 20 ans, il embarque comme premier lieutenant sur le 3-mâts EDMOND ROSTAND : 6 mois de mer de Cherbourg à Frisco, dont 2 mois au cap Horn où il gagne son titre de Cap-Hornier, apprenant à ses dépens que le cap dur n’était pas une légende. Le voyage dure 18 mois. Il refait 2 voyages sur le même bateau avec le Capitaine Rivoal dont il se plût à reconnaître les qualités qui à son avis ne sauraient être surpassées.
Après ces 2 voyages qu'il a effectués comme premier lieutenant, il repart en qualité de second capitaine sur le 3-mâts CAMBRONNE, capitaine Henry de l’île d'Yeu, puis toujours second sur le MARECHAL… illisible sur le manuscrit du livre d'or capitaine E. Renaut, et le ROCHAMBEAU, capitaine Alfred Jean.
Il débarque pour suivre à Paimpol, le cours de capitaine au long cours. Il obtient son brevet et la main de la sœur d’un camarade. Marié, il doit hélas renoncer à ses chers voiliers au moment où il va prendre le commandement du ROCHAMBEAU. Il prend du service à la Société Navale de l’Ouest. Il navigue successivement sur SAINT PIERRE, comme lieutenant, puis second capitaine sur SAINT MATHIEU, SAINT TH0MAS, SAINT BARNABE, SAINT VINCENT.
En 1914, il prend le commandement du SAINT PAUL, puis du SAINT VINCENT avec lequel il fait Salonique comme transport de troupes. Tombé malade en 1917, atteint de malaria et de dysenterie, de la Hardrouyère est versé au port de Brest et nommé commandant de l’île de Ouessant.
A la fin de la guerre, un de ses anciens capitaines de la Navale, devenu Capitaine d’armement aux Affréteurs Réunis, lui donne le commandement de l’EROS. Il commande par la suite l’EOLE et le PHOEBUS de la même compagnie, qui malheureusement doit liquider sa flotte.
Notre camarade rentre alors chez Lapry armateur qui lui confie le commandement du SYDNEY. Cette Société disparaît, elle aussi à son tour, il rentre alors à la Cie d’Orbigny où il navigue jusqu'à sa retraite, comme commandant du SOLON et du MYSON, effectuant les voyages Europe Buenos Aires. Il nous dit le plaisir qu’il a à revoir et à admirer les anciens compagnons des Cap Horniers, les albatros, quand il approchait du Rio de la Plata.
Au cours de sa navigation, de la Hardrouyère a été blessé 3 fois en service. Il en est resté mutilé de la main droite et du pied gauche.
Il sauve en Manche l’équipage du charbonnier EMILIE de Dunkerque, réfugié dans les embarcations, le navire coulant bas d'eau.
Etant lieutenant à bord du SAINT PIERRE, il sauve à Rouen un enfant tombé entre bord et quai au moment de l’accostage.. L’enfant étant le fils du commandant, le Capitaine F. Rozé de St Briac.
Malgré ses états de service et une si longue carrière de capitaine, notre camarade est du nombre trop grand malheureusement, des capitaines ou officiers, oubliés dans la distribution des distinctions : Légion d’Honneur, et Mérite Maritime, dont les contingents réservés aux «terriens» ou aux personnes n’appartenant pas à la Marine Marchande nous semblent vraiment exagérés !
Signé : L. Dolo, 9 février 1953.
Note : Le soussigné est heureux de signaler qu'il fut second sur le MYSON, sous les ordres de la Hardrouyère, et rend hommage à sa légendaire bonté. Officiers et hommes gardent un excellent souvenir de leur commandant.